19 juin 2011

Adieu tropiques

Transat 2011 - 2

L'équipage est à la hauteur : ce mercredi 15 juin au matin, tout l'avitaillement est fait.

Les cales regorgent de victuailles, boissons et produits divers.

On va pouvoir partir dans les temps.





L'entreprise attendue pour recoller le hublot n'est pas venue ! Nous avons donc pris outils et pistolet à Sika et fait une réparation de fortune.

Les panneaux solaires sont posés mais avec un festival de malfaçons : passe-coques sans étanchéité (signalés par mes 2 équipiers qui ont eu leur cabine douchée la première nuit au port), débranchement du circuit informatique... Nous avons réparé tout cela par nous-mêmes avant de partir, mais il y aura d'autres surprises une fois en mer.

Départ version rapide

A 10h30 Teles embouque la passe du Marin et s'élance vers les Açores.
 

Les premiers jours sont assez durs : navigation dans un alizé d'un bon force 5 que nous remontons au près, contre un fort courant portant au sud-ouest puis à l'ouest. Dans une mer agitée avec houle croisée et creux de 2 m, l'équipage est mis à rude épreuve.









Colin ne résiste pas et passe les premiers jours dans une quasi-prostration. Mais il prend courageusement ses quarts dès la deuxième nuit.


Le bateau fait sous-marin, balayé par les paquets de mer qui rentrent à flot par le hublot sommairement recollé : on écope au fur et à mesure, jour et nuit. La chaleur est étouffante à l'intérieur qui ne peut pas être aéré.
 

Après une centaine de milles de distance de l'arc antillais, un régime nettement plus confortable s'établit: vent d'est 15 nœuds remarquablement régulier, petite houle sage, Teles file entre 6 et 7 nœuds sur des rails. Nous faisons plus de 150 milles par 24 heures, avec un temps magnifique et des nuits illuminées par la pleine lune.

Sur les conseils de Michel, notre routeur, nous faisons route au nord pour contourner l'anticyclone qui envoie une grande dorsale avec zone déventée sur la route directe : à éviter à tout prix !

Sur le plan matériel, il y a eu de la distraction. La DuoGen a impeccablement chargé les batteries pendant une journée et demi, puis s'est mise en grève.















Axe tordu, visiblement, aucune réparation possible en navigation.


Heureusement nous avons les panneaux solaires : oui mais... ils ne donnent aucune charge ! Après plusieurs heures de travail sur le circuit électrique, où Alain a été d'un grand secours, il s'avère que la sortie du régulateur des panneaux n'est pas sur la bonne batterie ! Il y a aussi des bizarreries de câblage qui nous ont tenus en échec : ça marche, re-panne, nouvelle panne du circuit informatique, un probable court-circuit pendant un orage (il n'y a aucune protection sur les prises extérieures...), ce n'est qu'au bout du quatrième jour que les panneaux chargent enfin à plein régime dans les bonnes batteries ! Le travail des gredins de Caraibe Energie, pour être bâclé à ce point, nous a d'abord tiré une franche rigolade, mais nettement moins vers la fin du chantier...
  

Enfin nous avons de quoi tenir au prix de quelques restrictions électriques, et profiter de cette superbe navigation. Après ces premiers jours, l'équipage a trouvé ses marques, maîtrisé les cycles de sommeil, et l'ambiance est au beau fixe.

Nous passons le Tropique du Cancer le 19 juin. L'ambiance change progressivement : le vent adonne en mollissant un peu, ce qui permet d'envoyer toute la toile et de naviguer avec moins de gîte et d'embruns.








On peut enfin ouvrir les panneaux de pont et aérer le bateau
 
Colin retrouve la forme et commence à déployer ses talents culinaires

Sur les 5 premiers jours, plus de 700 milles ont été couverts.

Cette belle avance a une fin : le 20 juin le vent nous lâche.
 
Nous commençons à mettre les voiles de petit temps, code zéro et spi alternativement.

Le vent mollit encore et tombe à moins de 3 nœuds, parfois zéro. 

Malgré tous nos efforts de réglages subtils, les voiles ne sont même plus portées, nous dérivons et nous avons même reculé à certains moments, du fait d'un perfide courant contraire d'1 nœud !



Le code zéro à la peine

Il faut se résoudre à mettre le moteur dans les périodes de pétole extrême, où la mer est lisse comme un miroir.
 

A l'observation des relevés météo, que je reçois avec fébrilité, nous sommes bloqués derrière une bulle anticyclonique sans vent qu'il faut contourner par le nord. Michel le routeur nous trace une route de plus en plus nord. Notre moyenne journalière tombe à moins de 60 milles. Il faudra des jours et des jours...

Pourtant nous ne perdons pas le moral. Cette transition déventée était attendue, entre les alizés au sud et l'anticyclone des Açores au nord. Les heures de route au moteur sont mises à profit pour faire tourner le dessalinisateur et recharger tous les consommateurs sur batteries : Iridium, caméras, frontales et éclairages mobiles, etc. Le hublot recollé est repris au mastic silicone pour améliorer l'étanchéité.
 
Le pont est lavé en grand
 
Colin pétrit son premier pain

Alain a entrepris une révision de tout le circuit électrique pour en dresser un plan détaillé, ce qui sera bien utile : après le passage de multiples intervenants on ne s'y retrouve plus très bien...
 

Pour Colin, c'est l'heure de gloire : le 21 juin la ligne de traîne ramène un énorme poisson, genre brochet de mer (débat au sein de l'équipage sur sa dénomination exacte): environ 8 kg, 1 mètre de long.
 

Accommodé par notre chef, il va nous nourrir 4 jours durant, avec des recettes aussi imaginatives que succulentes : mariné au citron et huile d'olive, en steak poêlé, au curry à la crème et champignons sautés, frit avec ail et gingembre...
 

Entre ces agapes, les baignades ont été autorisées par le capitaine aux heures où on se traîne sous voiles à 1 nœud, car il fait toujours chaud (32°C, à peine moins la nuit).
 
Bout de rappel obligatoire

Pour finir la journée, une bière fraîche ou un apéritif au vieux rhum achèvent le tableau Club Med...!
 

Pendant que la croisière s'amuse, le vent ne vient toujours pas, ou par brefs épisodes où on se rue sur les voiles. Les heures de moteur consomment nos précieuses réserves de gazole. Le routeur nous écarte toujours plus vers le nord en commentant : "pas simple les conditions qui s'installent"...
 

Teles et son équipage vont-ils rester scotchés au milieu de l'atlantique pendant encore des jours, des semaines peut-être ? Dans combien de temps l'insouciance fera-t-elle place à l'angoisse de l'épuisement des réserves ? Le cap pourra-t-il enfin être mis un jour sur les Açores ?



A suivre ici
 

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