28 octobre 2012

Martinique-Guadeloupe en cata : instants magiques

Le moment tant attendu : retrouver Shrubb, oublier ce chantier interminable et enfin naviguer.

La saison cyclonique touche à sa fin en cette mi-octobre, quand je débarque au Marin (Martinique) pour réarmer le bateau et le convoyer jusqu'en Guadeloupe.










Mon équipier : Dylann, venu de Suisse pour découvrir la navigation en mer.

Les derniers travaux ont été retardés par une tempête tropicale qui ne s'est achevée que la veille de mon arrivée.


Dylann est là depuis 2 jours et a pris une douche monumentale. Le départ est retardé de 24 heures, le temps de quelques mises au point amusantes...
 

Je suis assez fier de mes WC électriques... jusqu'à ce que ceux des deux cabines avant tombent en panne l'un après l'autre : des poissons ont squatté le mécanisme ! Il paraît que ça n'arrive jamais... 

En tout cas cette friture ne nous inspire pas et Jean-Claude le plombier, rappelé en urgence, va illico chercher des filtres.



Les voiles sont gréées avec l'aide de Dan, de la Voilerie du Marin. Mal lui en prend, il se fait un méchant lumbago et nous finissons tout seuls. Et vive le winch électrique !
 

Restait le câble déficient du radar, que Fred et Mathieu arrivent à réparer. Ce radar n'est pas vraiment génial, enfin il fonctionne un peu...
 

Bref séjour de 24h au ponton pour charger la nouvelle annexe et effectuer diverses démarches. Notre départ est confirmé pour le 17 octobre.

Mercredi : Nous quittons le Marin, cap sur la Guadeloupe.




















Notre itinéraire : une traversée de 130 nautiques


La sortie du port nous met tout de suite en condition : l'hélice tribord a de terribles vibrations dès qu'on met un peu les gaz. Un bout, un filet dans l'hélice, déjà ? Pas le choix, on va mouiller à Ste Anne pour examiner le problème : en fait il y a un énorme paquet de moules sur les pales de ces hélices à pas variable, ce qui les empêche de prendre leur pas. Nous prenons chacun une hélice pour gratter et nettoyer. Problème résolu dès la remise en route.
 
Ça y est ! Shrubb avance toutes voiles déployées.


Nous avions prévu un stop à l'Anse à l'Âne pour y retrouver Hervé, skipper fameux régnant sur cette partie des Caraïbes. Mais le retard pris nous fait arriver à la nuit, trop tard pour l'apéro prévu. Au moins profitons-nous de ce beau mouillage.


L'Anse à l'Âne et l'Îlet Ramier

Jeudi : aucune peine à se réveiller à 6h du matin, nous sommes encore dans le décalage horaire. A 6h30 nous levons l'ancre et reprenons la route.
 
 
Au large de Fort-de-France entre les cargos au mouillage

La sortie de la baie de Fort-de-France est assez molle : peu de vent, masqué par les hauts reliefs de la côte. Il faut mettre du moteur à 1 ou 2 reprises quand le vent tombe à moins de 5 nœuds avec un courant contraire.
 
La Montagne Pelée sous les grains


Au nord de la Martinique, j'attends avec impatience le canal de la Dominique qui va nous redonner du souffle.










Une fois contourné le relief, le voilà ! Ça monte : 15, 18, 20 nœuds d'est sud est. Nous sommes au près bon plein, creux d'1m80. Shrubb accélère malgré le courant contraire et sa coque assez sale : entre 8 et 9 nœuds et parfois plus, sans effort apparent. Nous prenons un ris et je décide de passer au vent de la Dominique.

Aaaaaaaahhhhhh !!! le bonheur !!


L'option côte atlantique est bonne : nous sommes petit largue avec un bon force 5 qui a un peu fléchi après le passage du canal. Nous larguons le ris et poursuivons alors que le jour s'achève.

Ce bateau est vraiment sympa à mener, il tape très peu dans le clapot et étale magnifiquement la vague.  Une fois les dérives complètement descendues (bonne idée de mon équipier), la stabilité de route est totale avec un angle de barre à zéro sous pilote.


Eh bien, pas de casse, pas de galère ? Patience... 

En guise d'avertissement, la bosse du 3ème ris se détache de la bôme et va se prendre dans l'éolienne. Ah ! ces nœuds de chaise quand ils ne sont pas sous tension... Dylann a vite réparé.

A mi-hauteur de la Dominique la barre réagit bizarrement. Je débranche le pilote : la barre est complètement fixe, coincée, impossible à bouger. Encore des bulles dans l'hydraulique ? Non, elle ne tourne pas du tout et il n'y a plus de direction.

On met en panne et je descends dans la cale tribord où le problème saute aux yeux : le vérin s'est dévissé du secteur de barre, arrachant également le capteur d'angle. 

Ce n'est pas très grave mais il va falloir démonter quelques pièces et les violents mouvements du safran livré à lui-même rendent la manœuvre très difficile. J'arrive à une réparation de fortune, ruisselant de chaleur dans cette cale (heureusement le moteur tribord n'avait pas tourné !).
  


Lorsque j'émerge enfin, je trouve Dylann décomposé : la grand-voile est tombée d'un coup dans un grand bruit que je n'ai pas entendu. 

Coup d’œil vers la tête de mât : la poulie de mouflage nous nargue tout là-haut, avec sa manille cassée. Pas de dégât sur la voile ni le gréement, heureusement.






Nous n'avons qu'une idée en tête : la loi de Murphy... D'où va venir la suite ? Nous dérivons doucement vers la côte de la Dominique, il est temps de reprendre la route. Non, pas d'autre problème en vue. Le génois est déroulé et le moteur bâbord mis en marche. A eux deux, ils nous redonnent 6 à 7 nœuds. Le pilote marche correctement, un peu moins bien sans son capteur d'angle mais c'est un détail.

La nuit est tombée, Dylann a été bien malade : sans aucun doute les émotions... Heureusement il ne s'est rien produit de grave. J'ai eu tort de ne pas changer cette poulie au moment de la révision du gréement ; jusqu'ici elle ne s'était pas frottée à un étarquage du guindant au winch électrique : la manille n'a pas résisté !

Le passage de Guadeloupe, au nord de la Dominique, est assez venté, et même avec le seul génois nous en profitons pour gagner 1 à 2 nœuds. Quand nous passons sous le vent de Marie-Galante, l'air se charge du fort parfum des sucreries industrielles.

A minuit pile nous sommes devant Saint Louis de Marie-Galante. Au moment de mouiller s'abat un grain d'une violence incroyable, on distingue à peine la proue depuis la poupe du bateau ! Dylann courbe l'échine sous la douche devant le guindeau, et nous larguons la pioche comme si de rien n'était. Et pour se sécher, un bon bain de minuit !
 
Marie-Galante : le mouillage de St Louis
 
Vendredi : nous nous sommes octroyé une grasse matinée. Le soleil est déjà haut quand nous découvrons la côte de Marie-Galante. Les premières navettes arrivent assez tard et n'ont pas perturbé le petit matin.

Nous mettons à profit cette halte pour reprendre la réparation du vérin hydraulique de barre et prendre contact avec la capitainerie de St François.  Nous reprenons la route l'après-midi pour la dernière étape.

Sur la traversée entre Marie-Galante et St François, nous découvrons des zones truffées de filets au-dessus de hauts-fonds. Comme nous sommes toujours au moteur, on ne manque pas d'en prendre un dans l'hélice bâbord. Dylann se dévoue pour aller jouer du couteau, non sans risque car le bout enroulé tire l'hélice vers le fond et le bateau fait un bond dès qu'il est libéré. Instruits par cette expérience, nous surveillons les hauts-fonds sur le reste de la route, et il faudra plusieurs détours pour éviter de nouveaux accrochages. De l'avantage d'être sous voiles...
 

Malgré ces retards nous arrivons à St François en moins de 3 heures. 

L'accueil est particulièrement attentionné de la part de Dominique, le chef de la capitainerie : nous sommes guidés vers notre place avec toute l'assistance nécessaire dans ce petit port étroit où les manœuvres d'un cata de 48 pieds ne vont pas de soi. Heureusement il y a peu de vent et nous avons droit à une belle place sur catway.






Dans les heures qui suivent les contacts sont pris pour les quelques réparations à faire : Jérôme, qui tient le petit ship du port, monte au mât et nous ramène la poulie à changer. On se met d'accord sur d'éventuelles mesures d'urgence en cas d'alerte cyclonique (la saison n'est pas terminée), nous laissons Shrubb en ordre, et on l'espère en sécurité.
 

Retour dans un mois pour commencer les vraies balades : Shrubb devrait tenir ses promesses.
 

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